SUDUR “nez”.
On pense à rapprocher SUDUR de lat. odor.
-ōris “odeur”, gr.
ὀδμή/ὀσμή
(odmḗ/osmḗ) “flair, odorat”, εὐώδης
(euōdēs) “odorant”, ὀς-φραίνομαι
(os-phraínomai) “je sens (une odeur)”, ὄζω
(ózō), lit. u̇odʐ̊úi
“je sens (une odeur)”.
L'objection à ce rapprochement serait l'absence d'esprit
rude /ϝ/ (digamma) valant accentuation
/ʽ/, dans gr. ὀδμή/ὀσμή
(odmḗ/osmḗ), ὄζω
(ózō), mais l'arménien réalise un /h/
initial (réalisable en sifflante
habituellement pour un /ϝ/). Cf.
M. 459 : « l'arménien a, avec /h/
initial ajouté (comme dans d'autres cas analogues), hot
“odeur”, hotim “je
sens une odeur” et la forme intensive hototim
“je flaire”, avec un redoublement semblable à celui qu'offre
le parfait
grec ὄδωδα
(ódōda). » Ὄδωδα
est un parfait à sens d'état, Chtr. 777. Pour le /s/
initial de SUDUR, l'alternance : /h/s/ est régulière
en bsq.
/SUD-/ face à arm. hot.
D'autre part, répondant à gr. ὀδμή/ὀσμή
(odmḗ/osmḗ) “flair, odorat” de *οδσμᾱ
(odsmā) “odeur”, le bsq. a ASME/ASMU “pensée,
imagination”,SUSMO “flair, conjecture, soupçon,
supposition”, doublet de USMA “odorat, flair” et
de USNA “odorat”, qui semble une contraction de USAIN(A)
“odeur (bonne ou mauvaise)”, ressemblant à un génitif
de /*US-/ ; USAI “odeur” correspondant lui-même
à gr. /οδσ-/ (ods-)
/ὀσ-/
(os-) ; cf. gr. ὄζαινα
(ózaina) “odeur (mauvaise)”.
Le /s/ initial de SUDUR serait la réalisation
archaïque d'une laryngale
dont l'évolution (A. MARTINET, Évolution) partirait
d'une sourde (/k/s/p/d/,
etc.), passerait par l'aspirée (/h/
de l'arménien) et finirait par s'muir
(lat. olor, gr. ὄζω
[ózō] “sentir, exhaler une odeur”).
CHANTRAINE, 777, citant BEEKES, Laryngales, 131, donne
l’étymologie: « Racine /*od-/
[...] le présent ὄζω
[ózō] avec le suffixe /*-ye/yo/
a servi de base à la conjugaison et à la plupart des dérivés
». Lit. u̇odʐ̊úi
“sentir” dont le /o/ supposerait
pour l’i.-e. un présent athématique,
cf. lat. olō–ēre (avec
un /l/ pour /d/).
Dérivé nominal ὀδμή
(odmḗ) et ὀσμή
(osmḗ) “flair, odorat” à suffixe /*-smē/
à comparer à bsq. ASMU “pensée, imagination”
et ASMIA “odorat du chien” (Beyrie-sur-Joyeuse). La forme
SUDUR serait ainsi très ancienne. La forme SUDUR serait
ainsi très ancienne.
Le verbe latin à forme liquide
olō -ēre et surtout oleō
-ēre (avec un /l/
pour /d/) recouvre bsq. URRIN
“odeur” et gr. ῥī́ς-,
ῥῑνος (ϝ/wrīs,
ϝ/wrīnos) “nez”, qui semblerait
« propre au grec et [se serait] substitué au groupe attesté
par latin nārēs, véd.
nāsā (duel),
germ. all. nase. » À noter
la curiosité : v. irl. srōn
et bsq. SUNUR ou SUNNUR (sans le /d/), prononciation
réputée défectueuse et d'utilisage ludique.
Le radical /SUD-/ répondant à arm. hot
“odeur”, gr. ὄζω
(ózō) , ὀς-φραίνομαι
(os-phraínomai), lit. ůdʐ̊úi
“sentir” doit signifier “souffler, exhaler” et forme
la base d’un paradigme
étendu en euskera et en indo-européen :
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bsq. USTEL, PUSTEL “pourri,
corrompu” avec alternance /*PUS-/*US-/ ;
USTER/UZTER “tendre, faisandé” ;
PHUTZ “flatuosité”, PUZ-TU “(s)’enfler”
; PUZKA “soufflant” contraction de BUHA-Z-KA
“soufflant” ; POZ “joie” ;
PUZKAR “péter” composé /PHUZ/
+ /KAR/ “faire”, cf. skr. phut-karo̍ṯi
“il fait phut” = “souffler” ; |
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lat. pūtĕo, -ēre (v. fr.
puir) “être pourri, puer” ;
pŭtĕr à /u/ bref “décomposé,
fétide” ;
pustula “bulle”, russe pyxat “souffler fort”,
lit. pusti “souffler” ; |
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gr. πῡθομαι
(pūthomai) “pourrir, se putréfier”, πῡσαι
(pūsai) “faire pourrir”, cf. Πῡθω
= Phūtō nom de Delphes dont la prophétesse Phytie
rendait des oracles juchée sur un trépied au milieu
des émanations sulfureuses au dessus du gouffre sacré,
où son dieu Apollon avait tué le serpent Phyton, sensé
exhaler les puanteurs sacrées provoquant le “délire
divin” inspirant des paroles incohérentes que les
prêtres interprétaient ; |
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bsq. USU “pus”, “matière
putride” ;
USAIN “odeur” bonne ou mauvaise, USNA-TU
“flairer”, ESNE/EZNE “lait”
qui se corrompt vite ?
UZKI (UZ-GI) “anus”, “derrière”
(cf. anthroponyme
Montesquieux, gasc. lu skiu) ; |
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gr. πυός
(puós) “collostre ou premier lait”, πὐον
(puon) “pus”, peut-être πυγή
(pugḗ) “derrière”, sûrement πύννος
(púnnos) “anus”. |
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À noter que : « Les notions de “se coaguler,
surir, fermenter” peuvent s’associer à celles de “se
corrompre” » (nous soulignons) FRISK cité
par Chtr. 956. Cf. Bible : “fermenté” = “corrompu”.
Cf. skr. śara “sauce, sure”
acide, śaras “peau du lait”
lat.
cărĭēs “pourriture”.
Or bsq. (B) offre GALAZ/GALATZ (pour GARAZ) Azk. I,
319 : 1º “manteca de leche de vaca ; beurre de
lait de vache” ; 2º “nata o tela de la leche
; crème ou toile du lait”, forme qui peut être à
l’origine de gr. γάλα
(gála), génitif γάλακτος
(gálaktos) et lat. lāc “lait”.
L’euskera moderne dit GUR-I “beurre” (
GOR-A, GARA-I... “haut, dessus” et GAINA/GAÑA“crème”
contraction
de GARAINE superlatif en génitif
extractif = “le plus en dessus”. GALATZ recouvre exactement
skr. śaras ; bsq. KARATU
“(se) corrompre”, OIHENART XVIIº siècle,
recouvre lat. cărĭēs.
On a aussi le composé KARATS (KARA-HATS) “puanteur”.
La clé de la famille s’explique pour nous par les formes
de l’euskera. Pour lever les confusions possibles, précisons
pour les acceptions données pour GALATZ par Azk. dans la même
rubrique I, 319 : 3º “trigo barbudo ; blé
barbu”
GAR-I “céréale” en composition /*GAL-/
(peut-être du même fond “tête, haut, sommet”
de /GAR-/, cf. GAL-BURU “épi” soit “tête
de céréale”) et 4º “llar, crémaillère”
peut-être également de la même racine (cf. gr. κρεμαθρα
(kremathra) “suspensoir”, idée de hauteur : peut-être
thème
II /*KRE/
KAR-A, thème I, d’où dériveraient lat.
crēmum (crā-)
et gr. κρεμάννυμι
(kremánnumi) en thème II.
Voir GALATZ. |