BAHE, "toile" crible,
van ; BAHA-TU (verbe) passer au crible.
Composé GALBAHE tamis pour bluter la farine
/GARI/ froment, farine de froment,
cf. GARAGAR orge. Dérivé BAHETZIA
( BAHETTO) tamis, variante
MAZIA/MAZE tamis.
La forme /-BAHO/-MAHO/-MAO/
dans ARMI-MAHO toile d'araignée (Lecumberry, Estérençuby).
ARMIRI-MAO araignée (Azk.), ARMAMIO, ARMIARMO,
ARMIAMA araignée (Lh.), ARMIMA araignée
(Saint-Palais). Dans ces formes, si le deuxième terme de composé
livre son sens probable toile, le premier terme,
avec ses diverses formes, n'est plus compréhensible ou résulte
d'un original démotivé rendu peu méconnaissable [racine
/(H)AR-/ “fil” ?]. Cf. skr. ūrṇa-vā́bhi-
(et -vébhi) la tisseuse
de laine = l'araignée racine
i.-e. /*webh-/.
À noter encore la forme (S) AÑHARBA, AINHARBA
“araignée”.
Cf. gr. ὑφή
(h/wuphḗ) de ὑφηναι
(h/wuphēnai) tisser
bsq. EHUN tisser. Comme le /w/
et le /m/ alternent et se valent
en i.-e., on peut déjà sans témérité
rapprocher bsq. /MAHO/BAHO/BAHE/ de ὑφή
(h/wuphḗ). De plus EHUN/EHAIN battre,
tisser, tuer, etc. Dérive de /HO-/JO-/IO-/
frapper, battre, copuler, peut-être une onomatopée
de l'interjection HAN qu'émet celui qui
assène des coups répétés (de main, poing, massue,
masse, hache, etc., et même de copulation), ou encore un redoublement
de /HO/... Cette base se retrouve comme radical polymorphe d'un grand
nombre de termes dont les signifiés
se relient entre eux en dépit des apparences déconcertantes.
Le lien entre frapper et tuer est évident dans toutes les langues,
même avec d'autres racines : gr. κολάπτω
(koláptō) marteler, piqueter
gr. δρυ-κολάπτής
(dru-koláptḗs) et bsq. OKILO pic-vert ;
lit. kalù, kalti
forger, marteler et bsq. KALITU tuer (serpent)
d'un coup sec sur la tête, etc. Le lien entre battre
et moudre en bsq. est fondé sur le travail du pilon
qui est à l'origine de la réduction en farine des graines
de céréales, universellement. Battre et tisser
n'a pas besoin de conjectures : battre est la première
des opérations successives qui aboutissent au tissu ; on bat le lin
après rouissage, on bat la laine avant filage. La grande pièce
d'entrée de la maison, EZKARATZ, a un plafond plus élevé
que les autres pièces dans les maisons de Saint-Jean-Le-Vieux, Ahaxe,
où l'on sait qu'opéraient des tisserands au début du
XXème siècle, pour permettre aux opérateurs
de battre le lin avec de longs manches de bois ; ailleurs, pour battre les
épis au fléau. Le bsq. EHO tuer, moudre,
EHOLE tisserand, EHAILI battre à
coups redoublés (avec le doublet LIHO-TU battre
fortement de LIHO lin, et HIL tuer
lui-même, peut-être, sont les développements d'une même
racine /HO/JO/ frapper.
L'habitude est si bien établie d'attribuer à l'emprunt
par l'euskera toute forme évoquant des analogies evec le roman, que
pour Lhande BAHE roman bareja.
Mais bsq. EHAIN/EHAINDU tisser et gr. ὑφαντός
(h/wuphantós) tissé ? Le
roman n'en a pu être le vecteur pour emprunt.
On fera aussi remarquer que pouvant approximativement situer dans le passé
l'époque d'apparition de ces techniques, la langue d'avant
la séparation des groupes i.-e. n'est pas très éloignée
dans le temps : les millénaires se comptent avec les doigts d'une
seule main, sans difficulté.
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